La genèse de l'ID, par Bib56 et le Dr Danche

(partie 1)

Au salon 55, la DS est présentée.

Dès le salon suivant, on voit arriver l'ID, plus dépouillée, moins chère, moins technologique, et surtout ayant une boite mécanique bien rassurante.

Nous allons en examiner la genèse.

Une lecture recommandable sur le sujet est le "guide de l'ID", par le regretté Fabien Sabatès.

 

Pourquoi l'ID?

Ça semble assez net : pour réparer une erreur d'étude de marché.

La clientèle de la Traction est conservatrice, elle apprécie bien sûr les qualités routières de la voiture, mais nul doute qu'elle apprécie surtout son prix d'achat modéré, son entretien peu coûteux, sa cote ferme sur le marché de l'occasion.

Les rivales de la 11 sont d'ailleurs à chercher dans la catégorie 7/8CV : Peugeot 203 puis 403, Simca Aronde, éventuellement les Panhard Dyna Z...

Voir ce fichier tarif mis au point par Bib56.

Affichée 930.000F, la DS19 remplace de facto la Traction 15/6, mais la clientèle de la 11 est proprement laissée pour compte.

On peut penser qu’entre le début effectif de la commercialisation de la DS19 en novembre 1955 et le printemps 1956, on réalise avoir été très optimiste en pensant que la clientèle de la Traction Avant 11CV classique allait adhérer sans réserve à la DS19 et surtout, à son prix 50% plus élevé que celui d’une 11D Normale.

Il faut donc proposer une voiture à même de récupérer ces clients délaissés !

 

 

Le second point qui justifie l'ID : pour surmonter une difficulté réelle de fabrication de la DS, à la fois technique et financière.

Aux Etudes, on s’est peut-être emballé sur les possibilités de l’hydraulique : la fabrication au micron de tous ces organes coûte cher et n’est pas encore au point, et le montage sur chaîne est long et compliqué.
De plus, le réseau n’est absolument pas formé pour, non pas réparer, mais simplement régler la voiture.

Le prix de revient d’une DS 19 modèle 56 est non seulement prohibitif, mais la majorité d’entre elles coûte à l’usine une petite fortune en garantie: on en vient à se dire, horreur absolue, que la production anormalement lente des DS pour honorer les 80 000 commandes du salon est salutaire pour ne pas se ruiner en après-vente.

Le bilan 1956 de Citroën laisse apparaître un déficit de 828.000.000F, l'action Citroën baisse de 1000F, on ne peut continuer ainsi: il faut impérativement réussir à "sortir des voitures" qui ne coûtent pas anormalement cher en garantie.

Donc soit mettre le paquet et fiabiliser la DS, soit sortir un truc qui coûte moins cher et ne tombe pas en panne.

 

 

 

Quand a-t-il été décidé de lancer l'ID?

Ici deux thèses s'opposent.

La première, issue des "petits carnets de Boulanger", veut que d'entrée et tout au long du projet, on avait imaginé deux versions de la DS, en formant une gamme.

La seconde est celle de l'urgence: on se rend compte fin 55/début 56 qu'on va dans le mur et qu'il faut réagir au plus vite.

Magès, dans une longue interview qu'il donna à Sabatès, indiquait que pour lui on aurait du mettre le paquet pour fiabiliser la DS, plutôt que de se disperser ainsi avec l'ID, avec trop de versions. Preuve que rien n'était décidé ex ante.

Tout laisse penser que le concept de gamme avait certes été imaginé, mais dans une perspective de quelques années, et qu'au final, l'ID a été complètement improvisée, dans l'urgence, avec une décision de lancement de projet qui serait vers Mars 56 d'après certains documents d'époque montrés plus loint dans cet article.

 

 

Qui est le créateur de l'ID?

On connaît les pères de la DS, mais personne, au grand jamais, ne s'est vanté d'avoir créé l'ID.

On peut présumer que le "créateur" de l'ID fut une cellule de crise mise en place à la demande expresse du commerce et du réseau. Sabatès, qui a eu accès à des témoins d'époque, indique que le lancement de l'ID fit suite à une décision de Bercot.

On imagine bien le brief aux études suite à la consigne descendue de la Direction par la ligne rouge.

"Les gars, on boit le bouillon. On a 6 mois pour redresser la barre".

 

 

Les étapes-clé de l'émergence de l'ID

 

Mars 56: lancement du projet urgent d'une "DM"

26 Septembre 56: première présentation de la "DM" sous le nom d' "ID19" à la presse

Octobre 56 : présentation de prototypes ID19 au salon de l'auto

Oct 56 - Avril 57: hésitations sur la mécanique

4 Janvier 57: homomogation aux mines de l'ID19 (normale)

16 Avril 57 : homologation aux mines de l'ID19P

2 Mai 57: présentation du modèle à la presse et début de la commercialisation

Octobre 57: salon de l'auto avec l'ID catalogue

 

 

Etape 0: période Mars - Septembre 56

 

On a quelques photos de ce qui ressemble à une réflexion en cours sur l'aménagement intérieur d'un modèle dépouillé.

Des réflexions sur les intérieurs, sans même de tableau de bord ou de levier de vitesses.

Un tableau de bord sur du carton, avec un levier de vitesse, non pas avec une boule, mais avec une olive allongée genre DS.

 

Le nom du modèle qui se prépare est sans doute à ce stade "DM".

L'autojournal, toujours très bien informé, annonce ce nom dans son numéro du 1er Juillet 1956: "la DM 1957 à 750.000 Fr, une DS pour incrédule".

Et l'explication apportée tient debout:

"Nous pouvons préciser aujourd'hui que la nouveauté du Salon sera baptisée DM, M étant l'initiale du mot mécanique (par opposition à S, de DS; S = Spéciale")

... même si, ironie de l'histoire, la DSpécial sera, bien plus tard, un bas de gamme de la gamme D!

Etape 1: le 26 Septembre 1956

Citroën baptise finalement son nouveau modèle l' "ID".

L'Autojournal écrira que ce nom a été choisi au cours d'une réunion chez Citroën "tenue spécialement en vue de leur donner tort", alors qu'ils avaient révélé le nom prévu de "DM".

On est en droit de sourire. Pour ma part je crois effectivement que DM était bel et bien le nom prévu, car dans le catalogue des pièces détachées, c'est d'ailleurs le préfixe des pièces spécifiques ID.

Mais à un moment, une "réunion spéciale" a trouvé un nom se voulant plus commerçant, voilà tout.

 

 

Le nouveau modèle est l'objet d'une présentation presse d'un exemplaire de pré-série, le 26 Septembre 1956, juste avant le salon 56.

Voici quelques photos de ma collection qui correspondent à la voiture présentée p72-73 du livre de Sabates "le guide de l'ID" mentionné plus haut comme lecture conseillée .

Une video fascinante existe du journal de 20h, avec cette même voiture, au même endroit, avec la même jeune fille, mais avec une robe différente.

Noter qu'au début de la video ... c'est une DS, et non une ID, qui roule!

https://www.ina.fr/video/CAF90036194

 

 

D'après cet entrefilet, l'endroit de cet événement presse était les Salons des "Ambassadeurs".

Et ça se passait donc sur 3 séances, d'où les différentes robes de la même jeune fille.

 

Concernant le lieu de ce shooting, le restaurant des Ambassadeurs était à l'époque au sein de l'hôtel Crillon, à la Concorde. Il a depuis été réaménagé et seul subsiste à cet endroit le "bar des ambassadeurs".

L'ID ne sera pas la seule à faire l'objet d'une présentation presse à cet endroit, par exemple la Dyna Z y est présentée le 17 Juin 1953, et il existe plusieurs photos de ce shooting sur ce lien externe

Et ce n'est sans doute pas un hasard, les premiers modèles de pré-série, photographiés ailleurs en extérieur en Juin 1953 également, étaient d'une teinte appelée "vert ambassadeur"! Ma source pour le nom de cette couleur est ce lien.

C'est là aussi, aux Ambassadeurs, que le 5 Septembre 56 sera présentée à la presse, en pré-salon, la Panhard cabriolet Z1

 

Un courrier de 6 pages accompagne l'événement.

 

La page 2 nous parle d'un moteur 11D qui aurait été doté de "nouveaux perfectionnements techniques", qui ne sont absolument pas détaillés.

 

La page 4 annonce un rapport volumétrique de 6.8/1, et une puissance de 62ch. La page 5 nous indique une vitesse maximum 130 km/h.

Ce sont bien là les caractéristiques du moteur 11D standard de la Traction.

 

 

D'ailleurs, ouvrons le capot.

On y reconnaît un filtre à air plat, pas tout à fait identique, mais hérité de celui de la traction.

 

Ce serait ça, le "perfectionnement technique"?

Ce choix d'un moteur 11D semble précipité et incohérent : les 130km/h promis pour cette 11CV ne dépassent pas ceux de la 403, une 8CV de bonne réputation.

A ce stade l'échappement est central, comme sur DS.

Nous y reviendrons.

 

Dans ces premières présentations, l'ID cherche clairement sa forme définitive, comme si on avait voulu rassurer le plus vite possible les acheteurs de Traction.

Je vous l'avais d'ailleurs signalé plus haut: au début de la video INA, c'est bel et bien une DS qui roule, avec des catadioptres de DS, un tableau de bord de DS, et même une BVH! Regardez cet arrêt sur image!

Les choses restent très ambiguës dans la séquence photos suivante pour lancer l'ID, lors d'un shooting à Villesavin, objet du dossier de Chris "et la DS devint ID"

 

Etape 2: le salon de l'Auto 56 (modèles 57), en Octobre 56

Le prototype de l'ID est ensuite montré au public au salon 56, en trois exemplaires: il y a une capucine dans un rond, une noire posée là.

 

 

 

... et une turquoise dans un sinistre rectangle à rambardes, évoquant une tombe dans un cimetière militaire.

A ce salon 56 d'Octobre 1956, on ne parle pas de "Normale" et de "Luxe": il semble presque certain qu'on affiche en fait à ce salon seulement trois configurations de couleurs du même modèle à mécanique 11D et compartiment moteur provisoire.

Notons, entre autres, la plaque de chaleur, qui forme un caisson métallique en L qui est manifestement un ignoble bricolage.

 

 

 

 

D'autres choix restent provisoires.

Les voitures présentées au salon 56 (et celle de la vidéo de l'INA) ont la commande des clignotants sous le volant, comme la DS.

Le voyant de clignotant est à côté du voyant de charge, ce qui crée ce tableau de bord insolite à deux voyants.

 

 

Comment puis-je affirmer que ce voyant, c'est le clignotant?

Grâce à ce schéma du tableau de bord accompagnant les documents Citroën du salon 56.

A-t-on prévu de maintenir la direction assistée ? C'est peu probable, car la voiture prototype a le tuyau d'aspiration de la pompe HP qui arrive côté gauche du moteur, côté arbre à cames, précisément là où sera située la pompe monopiston des ID de série.

 

Pour autant, le volant semble très petit.

On a le sentiment que c'est le volant qu'aura la DS au millésime 58, à gros ruban.

 


Ici une photo de presse de ce tableau de bord à deux gros voyants.

On relève aussi ici que le boîtier de commande de hauteur ne ressemble pas à ce qu'on connaîtra en série.

 

 

Une photo d'illustration d'une autre hésitation, peut-être moins cruciale, autour de la couleur du frein à main.

Ce siège en poil de teckel est lui aussi encore un matériau prototype.

 

Le 6 Octobre 56, en marge du salon, Paris Match publie un article sur l'ID, laissant entendre, à tort, que la mise en production est effective ("la chaîne des DS met au monde une soeur cadette l'ID 19...").

France Dimanche est plus précis: l'ID sera livrable au Printemps.

Le 15 Octobre, l'Autojournal persifle autour du changement de nom "DM" pour "ID".

 

.. et parle d'un cas "unique dans l'histoire de l'automobile" (la sortie d'un modèle moins puissant que celui dont il dérive) tout en nous annonçant en scoop une vriae gamme:

ID, DS actuelle, et "DS grand Luxe", avec le 6 Cylindres!

 

 

Le rédacteur s'étonne au passage que Citroën en reste au moteur 11D alors qu'une culasse moderne, hémisphérique, comme Peugeot en fait en série depuis la 203, serait plus adaptée. 

Le journal "l'automobile" de Novembre 1956 résume bien ce qui s'est passé chez Citroën :

- c'est seulement en Mars 56 que les dirigeants de Citroën se sont convaincus que la DS ne serait pas suffisante pour remplacer la 11 et la 15.

- on a alors "désespérément cherché à simplifier la voiture expérimentale", "abaisser son prix de revient prohibitif" et "surtout restreindre les possibilités de défaillance".

- on a retenu le moteur 11D (l'article ne cite pas deux possibilités de motorisation)

- on a mis sur le volant "une sorte de ruban adhésif, comme sur les bicyclettes"

 

Et à ce stade c'est une improvisation totale: pas de prix, pas de commande possible au salon.

 

 

 

 

 

 

 

Etape 3: homologation de l'ID (Normale)

Aimablement transmis par Marco, qui possède une des seules ID Normales survivantes, voici le barré rouge (devenu noir car photocopié..) de l'ID normale.

 

 

 

Le document est une version de 1959, mais on y lit la date de première présentation aux mines, le 3 Décembre 1956 et son homologation, le 4 Janvier 1957.

Notons que le réservoir est de 60 litres et non 50 comme envisagé.

A ce stade on est donc prêt à entamer la production et la vente.

 

 

Etape 4: hésitations après le salon

Mais pourtant, pendant la période qui suit le Salon 1956 et cette homologation de l'ID, aucune voiture n'est commercialisée.

Car on ne peut quand même pas en rester à un moteur Traction, ce sera invendable: l'ID 19 se classant dans la catégorie des 11CV fiscaux, il convient de lui donner des performances supérieures à celles d'une simple 403 de 8CV, par ailleurs moins chère à l'achat.

On tente donc d'insérer un moteur DS.

On peut penser que le moteur DS19, tel qu'il est jusqu'au millésime 59, n'est pas réussi : la tubulure d'admission est encombrante, l'accès à l'allumeur et à la pompe à essence se trouve compliqué par cette tubulure, et les réglages de l'allumage sont suffisamment complexes pour décourager les agents d'intervenir. De plus, ses performances laissent à désirer. Le retours du réseau sont édifiants.

L'occasion se présente donc de développer un moteur pour l'ID qui, d'une certaine façon, va corriger ces défauts : la culasse aluminium de la DS est modifiée pour recevoir une tubulure d'admission intégrée, ce qui permet d'utiliser un distributeur d'allumage classique, et de le rendre ainsi que la pompe à essence, normalement accessibles (ainsi que la pompe HP monopiston).

Ci-contre, une photo de Février 57 nous montre un raccord entre filtre à air et carburateur ayant une forme provisoire, il semble en trois morceaux : il s'agit sans doute d'un bricolage prototype.

A ce stade, la bobine conserve une position horizontale (idem 2CV et DS).

 

Ici une photo avec une autre ID prototype, ayant cette fois une pré-détente, comme sur DS.

 

 

Et on débouche au final en Avril 57 sur deux modèles différents:

l'ID19 normale, qui a un peu évolué mais est restée à moteur 11D.

 

et l'ID19P, à moteur DS, et sans pré-détente.

(mais la pré-détente n'est pas pour autant abandonnée: elle est présente si on choisit une ID Luxe à "Confort DS": car avoir le "Confort DS" c'est avoir les sièges de la DS mais aussi son silence)

La bobine a retrouvé une position plus orthodoxe.

Ce moteur donne un souffle très correct à l'ID : même si l'on annonce 135km/h maxi, les ID seront chronométrées à 142/143... soit une vitesse très proche de celle des DS 75ch.

On peut penser que, dès ce moment, le moteur ID19P va avoir une évolution pour la DS, qui arrivera au millésime 60 avec la culasse à tubulure intégrée et allumage "classique" (moteur 78ch) et surtout en mars 61 avec l'excellent 83ch à damper.

 

 

 

 

Certains esprits forts pensent, face à cette gestation difficile, que le "P", dans "ID19P" est une numérotation alphabétique des différentes versions ayant été nécessaires avant d'aboutir à ce résultat.

Plus sérieusement, cette question du pourquoi de la lettre P dans "ID19P" a déjà fait l'objet d'un dossier du Dr Danche, proposant que le P serait pour "Perfo" ou "Poillot".

 


"Messieurs, il faut que vous en finissiez.
Et sachez que, quoi qu'il arrive, nous ne commercialiserons
pas une ID19 avec un Q".

 

Etape 5: homologation de l'ID19P et catalogues

Le 16 Avril 1957, l'ID19P est enfin homologuée aux Mines.

Ici un barré rouge postérieur (je n'ai que celui de 1960), mais où l'on trouve cette date originelle, signée Flageolet.

 

 

 

Les catalogues accompagnent le flou de l'émergence progressive de cette ID19P, à moteur DS.

 

Sous la même référence AC 5169-7-56, il y a plusieurs versions du premier catalogue ID.

 

La première version (dont on peut donc penser qu'elle date de l'été 56 au vu de sa référence AC "7-56"), nous propose une voiture avec un moteur 11D: Les caractéristiques sont celles du Salon 56 : compression 6.8, 130 km/h en 4ème.

 

Mais, toujours avec la même référence de catalogue AC 5169-7-56, il y a aussi cette autre version, sur laquelle toutes les caractéristiques moteur (culasse aluminium, compression 7.5, 66ch. ) ont eté modifiées via un grand autocollant

 

 

Mais il y a eu un oubli pour la vitesse de pointe.

 

 

C'est donc un petit autocollant, collé sur le grand, à la limite du gag, qui la passe à 135km/h!

(Une troisième mouture de ce catalogue n'a plus qu'un seul autocollant, sans erreur celui là..]

Quel bricolage!

 

Et quelle version de catalogue était-elle distribuée dans le dossier de presse du salon 56?

 

 

Etape 6: la version définitive

Le 2 Mai 1957, au Pré Catelan, a enfin lieu la présentation à la presse de l'ID19 et ID19P dans leur version définitive, pour commercialisation dans la foulée.

 

 

 

Un petit dossier presse est diffusé le même jour.

On y parle de "tissu ocellé" pour qualifier le helanca gros motif qui apparaît à cette occasion.

Ici une surprenante photo de presse inversée, montrant les trois coloris du lancement.  
Retournée dans le bon sens, ça donnerait ça  

 

Dans la foulée, Javel envoie le courrier de lancement aux concessionnaires.

L'ID est proposée en trois finitions: Normale, Luxe et Confort (intérieur et pré-détente type DS).

La finition Confort est proposée au départ sous la forme d'un supplément à l'ID Luxe. Pour information une de ces premières ID Confort a survécu, elle est présentée sur ce lien.

J'ai déjà fait un dossier complet sur la Normale et la Luxe.

 

 

Le journal "le Citroën" du 2 Mai 1957 (cliquez sur l'image pour l'avoir en bonne définition) commente les caractéristiques de la voiture.

 

 

En réalité, l'ID19P devance la DS sur trois points:

  • L’échappement qui débouche à gauche et non au centre

l'ID sort en série mi 57 avec les 2 tuyaux d'échappement à gauche, et la DS attendra Février 58. Ce décalage de date est sans doute le temps d'évacuer les anciennes caisses DS, car la modification de l'emplacement des tuyaux implique une légère modification de caisse pour le passage desdits tuyaux (pour la languette en caoutchouc qui retient les 2 tubes). Sur ce point, l'ID de série a donc eu de l'avance sur la DS!
Ce lien sur le site avance une raison pour laquelle on abandonna l'échappement central.

 

  • La culasse hémisphérique à tubulure intégrée
  • L’allumage par distributeur « Delco ».

Sabatès, à la page 20 d'un autre de ses ouvrages, le « guide de la DS19 », indique que le moteur à culasse hémisphérique n’a pas été réellement testé par le Labo et qu’il a été mis en chantier « en catastrophe » en 54-55.

L'ID19P l'amléiorera avec une solution tenant compte des retours du réseau (accessibilité à l’allumage, mise au point compliquée, etc…), et qui sera ensuite adoptée par la DS en 1960.

L'ID19P a renoncé à l'ineptie de l'échappement central!
L'ID19P a mis au point le moteur de la DS!
L'ID19P s'est très bien vendue!
L'ID19P a peut-être sauvé la DS voire Citroën!

 

L'auto-journal de Mai 57 n'a pas prévu tout ça, et est plutôt vachard: "Comment en est-on arrivé à vendre presque un million un modèle très en retrait par rapport à la DS19".

Et énumère des dictons perfides:

"Un jour la montagne, dit-on, accoucha d'une souris. Il ne faut donc pas d'étonner de voir une déesse engendrer une idée. Au mois de Mai ces voitures sont sorties du bois; mais les lauriers ne sont-ils pas coupés?"

 

Pour se remettre dans le contexte, ce journal se vante de façon générale de ne pas copiner avec les constructeurs (contrairement aux autres magazines appelés "Monsieur Toutébon"), et a été attaqué en justice par Citroën suite aux révélations faites sur la DS avant sa sortie.

 

L'intérieur de l'Autojournal liste les 33 différences entre DS19 et ID19 Luxe, ainsi que les écarts entre ID Luxe et ID Normale.

 

En Mai 57, le journal "l'automobile" publie dans son numero 133 le peu qu'il sait de l'ID, sur la base des photos de presse antérieures: voyant de clignotant, boîtier inconnu de commande de hauteur...

 

 

 

Mais en Juin, pour son numéro 134, ce journal publie un essai complet, car Citroën lui a prêté un des prototypes, 4790 W0, Capucine intérieur broché noir et blanc.

On voit ici clairement l'échappement latéral dont je parlais plus haut.

Elle a cette fois le boîtier de commande de hauteur que l'on connaîtra sur les premières ID.

Ses qualités sont reconnues, mais elle est considérée comme d'un prix la rendant malheureusement inaccessible aux anciens fidèles de la 11cv.

De plus la couleur Capucine n'a pas trop plu à l'essayeur: "... se lance à corps perdu dans les présentations d'avant-garde... à titre d'exemple la voiture qui nous a été confiée avait une carrosserie de teinte capucine... si cela plait à certains usagers, cela choque terriblement bon nombre d'autres".

 

 

 

 

Précisons qu'il existe dans la photothèque Citroën quelques rares vues couleur de cette "4790 W0" en teinte Capucine.  

 

Le 27 Juin, le journal Tintin aura la chance d'essayer une ID19 Luxe (donc sans pré détente), elle aussi Capucine, je lis 4792 W0, mais ça pourrait peut-être être 4790.

Tintin trouve lui le Capucine superbe et cite un "intérieur gris", c'est probablement une approximation pour qualifier le même tissu broché noir et blanc que pour l'essai de l'Automobile.

 

 
Le banc d'essai de l'auto-journal de Septembre 57 note des performances proches de la DS et un équipement général "déficient", ce qui n'est pas une insulte puisque le Larousse nous dit "déficient: qui présente une insuffisance dans son développement".

Puis en Octobre 1957, c'est l'officialisation: les trois couleurs de lancement (inchangées) sont exposées au salon de l'auto 57 pour les millésimes 58.

L'ID noire est cette fois l'ID normale, à moteur 11D.

Et les deux autres sont des ID19P, à moteur DS, qui diffèrent entre elles par la finition: il y a une ID luxe, et une ID Luxe "à confort DS".

 

Sur ce petit mot accompagnant la photo du salon 57, avec le prix demandé pour ID Normale, ID Luxe et pour l'option "confort intérieur DS", ce petit mot émouvant attestant qu'un petit jeune, embauché en 57, était présent: Wolgensinger.

 

Lire la suite du dossier: premier marketing de l'ID